L R AS Published on Monday 6 February 2017 - n° 178 - Categories:Regard sur le PV

Le Regard sur le PV n° 178

 

LA COURSE AUX INVESTISSEMENTS DANS LA FILIERE RESTE PLUS QUE JAMAIS  AU CENTRE DE L'ACTUALITE

 Les investissements mondiaux restent à un haut niveau en 2017 malgré la surproduction du quatrième trimestre

Pourquoi de tels investissements ?

Ces investissements pourraient aussi servir à changer de technologie

Alors pourquoi ?

La Chine concentre environ la moitié des investissements sur la période 2015-2018

Ces investissements sont motivés par la conviction de l'inévitable émergence du photovoltaïque dans le monde au cours des prochaines années

Si toutes veulent réussir, nombre de sociétés seront limitées par leurs ressources financières

Les victimes de cette lutte féroce sont et seront en priorité des entreprises chinoises

Déjà, l'amont de la filière serait gravement affectée par la crise financière, ce qui ne pourrait que s'aggraver

Pour essayer d'être présentes à la fin de la période de concentration, les sociétés chinoises sont prêtes à prendre de gros risques

 

STATISTIQUES 2016

 

A NOTER :

 

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LA COURSE AUX INVESTISSEMENTS DANS LA FILIERE RESTE PLUS QUE JAMAIS  AU CENTRE DE L'ACTUALITE

   Le graphique des investissements par segment de la filière est particulièrement intéressant à condition qu’on lui enlève la partie silicium qui, elle, provient des investissements de Wacker pour créer une nouvelle unité de production aux Etats Unis.  

 

 

Les investissements mondiaux restent à un haut niveau en 2017 malgré la surproduction du quatrième trimestre

    Malgré les investissements considérables effectués dans la filière en 2015 et 2016, ils resteront quasiment au même niveau en 2017. Or, le second semestre 2016 a été marqué par une surproduction dans l’ensemble de la filière et une sensible baisse des prix. On peut se demander vraiment à quoi serviront ces investissements alors qu’il y a déjà surproduction ! A moderniser l’outil de production ? Certes, il y a la nécessité pour les fabricants de passer à la coupe au fil diamanté, et à investir dans le façonnage de la face coupée pour pouvoir être transformée en cellules dans de bonnes conditions, ou encore pour passer à la production de cellules PERC, mais on ne voit pas pourquoi il y a la nécessité d’investir tellement dans les cellules, comme ceci ressort de ce graphique.

 

Pourquoi de tels investissements ?

    Est-ce que ces investissements serviront à augmenter les capacités ? Il faut le croire malgré la situation actuelle de surproduction, et malgré les prévisions d’organismes spécialisés qui envisagent une stabilisation de la demande en 2017. Ceux-ci hésitent entre une diminution des installations mondiales en 2017 sur 2016 et une très légère augmentation : ils envisagent entre 65 GW et 75 GW en 2017, contre 70 GW en 2016. En tout cas, on ne prévoit pas d’augmentation de la demande qui absorberait les capacités supplémentaires ! Dès lors, quelles sont les motivations des fabricants chinois ? Personne ne s’exprime officiellement sur le sujet mais les annonces d’augmentations de capacités se succèdent, non seulement en Chine (Longi avec 5 GW de silicium, Tongwei veut augmenter de 2 GW sa capacité de production de cellules en 2017 soit 60 % de plus qu’actuellement,…), à Taïwan où TSEC veut agrandir ses capacités de 450 MW (soit + 40 %), dans le sud-est asiatique (JA Solar envisage une usine de cellules et de panneaux de 1,5 GW au Vietnam), mais aussi en Inde, en Amérique du Sud, et aux Etats-Unis avec Panasonic fabricant pour Tesla !

 

Ces investissements pourraient aussi servir à changer de technologie

   Cette course à l’investissement peut aussi provenir de la volonté de changement de technologies. Les acheteurs veulent de plus en plus de panneaux à haut rendement, mais ce haut rendement correspond à un taux de conversion autour de 18,5 % contre 17,5 % habituellement. On est loin d’un changement d’échelle dans le taux de conversion. Ces investissements ne paraissent pas destinés à changer de type de cellules pour aller vers l’hétérojonction, l’IBC ou les cellules de type N. Même si le mouvement va vers ces technologies, elles sont encore très largement minoritaires parmi les fabricants. Seul Longi pousse ouvertement au changement de type de silicium, préconisant le monosilicium. Cette société considère que si elle parvient à une capacité de production de silicium de 10 GW, elle commencera à peser sur le marché et incitera les fabricants de cellules à passer de la plaquette P poly-cristalline fournie par CGL Poly, à la plaquette P monocristalline produite par elle (l’écart de taux de conversion entre les deux est de l’ordre de 1 % en plus pour le monosilicium). Les investissements dans la filière et par pays entre 2013 et 2018; Longi veut détrôner GCL Poly au moyen d'une forte capacité de production de monosilicium

 

    Alors pourquoi ?

    Un début de réponse nous a été fourni par un directeur de chez Total. Il nous a dit qu’il n’y aurait aucun arrêt des investissements car les producteurs ont constaté qu’il leur faut parvenir à une capacité de production de 10 gigawatts pour créer une différence de taille avec les autres fabricants et s’imposer sur les marchés. Or, Trina ou JinkoSolar sont autour de 6 GW de capacité. Ils considèrent que les économies d’échelle pourront alors encore mieux jouer à 10 GW qu’à 6 GW et bien sûr qu’à 3 GW. D’où la « nécessité » d’augmenter leurs capacités.

 

La Chine concentre environ la moitié des investissements sur la période 2015-2018

    Pas n’importe où ! La Chine reste privilégiée car c’est là que peuvent être installées les giga-usines de production. Mais la concentration sur un seul territoire même immense crée des risques de réaction de la part des étrangers, à travers les droits de douane.

    D’où si sur le graphique ci-dessus, on retire la partie chinoise, on constate que le montant des investissements dans les autres pays en 2015 est égal à celui de 2016 et à celui de 2017, puis se réduirait légèrement en 2018. Les principaux pays qui profitent de ces investissements pour la fabrication de panneaux, ne sont que des satellites de la Chine : le Vietnam, la Thaïlande et dans une moindre mesure la Malaisie. En revanche, on ne constate pas d’augmentation importante du montant des investissements dans ces pays au cours des années sous revue.

 

    Ces pays permettent aux entreprises chinoises d’apparaitre comme des producteurs indépendants de la Chine et de ne pas supporter les droits de douane imposés par les Etats-Unis ou l’Europe. Ainsi, les fabricants chinois réduisent leur risque lié à un seul pays et évitent les réactions hostiles des pays consommateurs… Jusqu’à un certain point car D. Trump qui veut faire produire américain trouvera bien un moyen de taxer ce type de production.

 

Ces investissements sont motivés par la conviction de l'inévitable émergence du photovoltaïque dans le monde au cours des prochaines années

    Ce dirigeant de Total faisait aussi remarquer que cette vague continue d’investissement provient certes de raisons industrielles, mais aussi de la conviction que la demande de panneaux ne peut que s’accélérer au cours des prochaines années du fait de la baisse des prix, de la généralisation du photovoltaïque tant dans les grandes centrales pour fournir de l’électricité au réseau, qu’au travers de l’autoconsommation qui crée des besoins considérables. Si on y ajoute la mutation de l’industrie automobile vers les véhicules électriques, on a une demande qui sera sans commune mesure d’ici deux ans avec les 70 GW vendus et installés en 2016. Les fabricants qui voient à horizon de 2018-2020, ont la nécessité de se préparer à cette accélération prévisible de la demande, et à augmenter leurs capacités de production.

 

Si toutes veulent réussir, nombre de sociétés seront limitées par leurs ressources financières

 Pourtant, cette course aux investissements à un coût, car il faut des ressources financières pour cela. Or, les sociétés chinoises sont endettées en partie par les équipements qu’elles ont financés dans le passé, en partie par les centrales photovoltaïques installées comme un moyen d’obtenir des revenus réguliers durablement, mais qui immobilisent d’importants capitaux. Jusqu’à présent, au moyen de financements à base d’obligations convertibles ou d’emprunts swapés (échangés contre des emprunts libellés dans une devise étrangère où les taux d’intérêts sont très faibles), elles avaient réussi à ne pas avoir de frais financiers. Donc, elles pouvaient concentrer leurs efforts sur les coûts de production. Seulement, cet « âge d’or » est achevé car les prêteurs ont constaté que les cours des actions de ces sociétés n’avaient pas le parcours escompté et qu’ils n’avaient rien gagné à échanger un faible taux d’intérêt pour leurs capitaux contre la perspective d’un gain qu’ils n’ont pas réussi à obtenir. Dès lors, sauf à obtenir des prêts abondés par les municipalités ou les régions chinoises, elles devront emprunter à des taux plus normaux, ce qui fera peser un risque sur leur compte d’exploitation même si les banquiers sont particulièrement compréhensifs avec les capitaux propres négatifs, un taux d’endettement de deux fois les capitaux propres, des pertes de changes élevées ou des stocks conséquents. En revanche, le gouvernement chinois a déjà montré qu’il n’était pas prêt à sortir de la faillite les sociétés étranglées par leurs dettes telles que Suntech, Yingli, LDK Solar,…

 

Les victimes de cette lutte féroce sont et seront en priorité des entreprises chinoises

    En même temps, cette course aux investissements ne se fait plus comme pendant la période 2009-2011 contre les fabricants étrangers (à l’époque européens), mais cette lutte se pratique entre entreprises chinoises. Les victimes seront les entreprises les moins bien positionnées, les moins dynamiques dans leurs ventes, les moins bien soutenues par les autorités. Il faut s’attendre à des faillites retentissantes à horizon de quelques semestres.

   On en a déjà un exemple avec le chinois Hareon qui est un des plus grands fabricants de plaquettes au silicium de Chine et un important producteur de panneaux. Il était bénéficiaire de 6,7 M$ au cours des neuf premiers mois de 2016. Au cours des trois derniers mois de 2016, il est « parvenu » à perdre entre 60 M$ et 80 M$ en partie du fait de la chute des prix de vente des plaquettes, des pertes de changes, et de pertes sur les activités EPC. S’il envisage un tel niveau de pertes, c’est qu’il prépare l’opinion. En définitive, la perte de l’exercice pourrait être plus lourde. Il n’a fait que subir la pression qui s’est exercée sur les fabricants de plaquettes qui ont vu le prix de leur approvisionnement (le silicium) augmenter et le prix de vente des produits finis (les plaquettes) baisser. Cette mésaventure a dû arriver à nombre de sociétés chinoises de fabrication de plaquettes. Elles avaient cru pouvoir faire confiance à leurs fournisseurs et se retrouvent étranglées !

    Ce qui s’est passé avec les plaquettes s’est aussi produit (probablement dans une moindre mesure) pour les fabricants de cellules qui ont vu les prix de vente baisser au profit des vendeurs de panneaux qui ont mieux maintenu leurs prix

 

Déjà, l'amont de la filière serait gravement affectée par la crise financière, ce qui ne pourrait que s'aggraver

    Comme pour confirmer que la situation des sociétés chinoises n’est pas saine, à la tribune du colloque organisé par le Syndicat des Energies Renouvelables cette semaine, le PDG de Total, s’est inquiété de la situation des fabricants de la filière solaire. Pour lui, la baisse accélérée des prix dans la filière est l’indice d’une dégradation profonde de la situation. Il parle même de « désastre pour l’amont de la filière ». Les entreprises qui fabriquent des plaquettes et des cellules perdent de l’argent. Et il explique la situation parce que la « Chine a choisi de subventionner violemment ce secteur ». Il en parle en connaissance de cause car sa filiale américaine SunPower subit de façon directe ces difficultés.

 

Pour essayer d'être présentes à la fin de la période de concentration, les sociétés chinoises sont prêtes à prendre de gros risques

    Même si des entreprises chinoises de taille significative dans la filière faisaient faillite, il y aurait vite des concurrents trop contents de récupérer les équipements et les outils de travail pour les relancer sous leur marque, sans que ces disparitions ne servent à assainir l’industrie photovoltaïque, comme cela se passe habituellement dans l’économie. On est dans une période étrange.

    Ainsi, on arrive à la situation explosive où les entreprises chinoises sont convaincues de l’avenir brillant du photovoltaïque, et espèrent en tirer profit avec des augmentations de capacités. En attendant, elles doivent traverser des turbulences mortelles avant qu’un très petit nombre puisse profiter de cet avenir brillant… Rappelons le propos du président de Trina Solar qui avait envisagé il y a environ un an une telle concentration dans le secteur et annoncait qu'on parviendrait vite à ce qu’il ne reste plus que cinq ou six entreprises mondiales fabricant des panneaux…

 

STATISTIQUES 2016

    Le mois de février est propice aux statistiques sur l’année écoulée.

    La France dispose d’un parc solaire de 6.672 MW fin décembre après avoir installé 109 MW au 4ème trimestre et 576 MW au cours de l’ensemble de l’année, soit une hausse de 9 % sur décembre 2015.

    Ces 576 MW représentent 26 % de l’accroissement des générateurs d’électricité renouvelables installés en 2016 (qui s’établissent à 2,2 GW). Le reste (62 %) est fourni par l'éolien. Ces 2,2 GW représentent une augmentation annuelle de 5 % du parc de production d’énergies renouvelables, porté ainsi à 45,8 GW. Ce parc a fourni 19,6 % de la consommation française d’électricité durant l’année 2016.

 

    En Europe, le volume photovoltaïque installé en 2016 s’est établi à 6,9 GW, soit un recul de 20 % par rapport à 2015. Ceci intervient dans un monde où les installations PV ont augmenté de 50 % à 71,6 GW. La Chine en a installé 34,2 GW, les Etats-Unis 14 GW, le Japon 8,6 GW, l'Inde 4,5 GW. Ainsi, les Etats-Unis avec une population deux fois inférieure à celle des 28 pays de l'Union Européenne ont installé deux fois plus de photovoltaïque !

 

A NOTER :

- Les tarifs pour le 1er trimestre ont été publiés : le tarif T1 baisse de 1,5 %, le tarif T4 de 0,8 %. Tarifs d’achat du 1er janvier au 31 mars 2017

 

- Fonroche se scinde en deux : les fondateurs conservent les activités géothermie et biomasse. Les financiers prennent les activités solaires (110 MW détenus en propre, 120 MW en gestion) ainsi que le portefeuille de projets.

 

- Les dix premiers fabricants mondiaux de panneaux sont dans l’ordre : JinkoSolar n° 1, Trina Solar, Canadian Solar, Hanwha Q Cells, JA Solar, GCL, First Solar, Yingli Solar, Talesun, Risen

 

- Les capacités industrielles de l’Inde sont très limitées. Le budget pour l’année avril 2017-mars 2018, ne prévoit aucune subvention d’investissement

 

-Les installations 2016 en Allemagne (1,54 GW) ont interrompu leur chute précédente, en se redressant légèrement.

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