L R AS Published on Tuesday 9 July 2019 - n° 284 - Categories:Regard sur le PV

Regard sur l’actualité en France, et sur le nouveau record de prix

Il faut dire deux mots de l’actualité en France : Attention DANGER !

La critique ouverte de la CRE

Sans mesure corrective, le photovoltaïque est en danger

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Le nouveau prix record sur une enchère

 Ceci s’explique par l’arrêt des installations en Chine au second semestre 2018

Et par la baisse naturelle des prix des panneaux et par l’augmentation des capacités

Le nouveau record n’a pas été critiqué comme inatteignable !

Le texte :

Il faut dire deux mots de l’actualité en France : Attention DANGER !

Tout d’abord, le coût des aides françaises accordées au photovoltaïque et à l’éolien a absorbé 106 milliards d’euros entre l’an 2000 et 2018. Ceci représente près de 11 % de la dette publique française. Ce montant a permis d’installer 8 GW solaires et 15 GW éolien. Si on devait mélanger des choux et des carottes, on dirait que les 106 Mds € ont permis d’installer 23 GW de capacité d’énergie renouvelable, soit 4,6 millions d’euros le mégawatt. C’est grosso modo, quatre fois le prix de construction d’une centrale solaire. Cela laisse songeur.

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La critique ouverte de la CRE

Le second aspect est la critique ouverte de la CRE contre les pratiques de certains développeurs lors de l’appel d’offres CRE 4-7. Il s’agit des installations sur les bâtiments de 0,1 à 8 MWc. Ils n’ont pas hésité à représenter quatorze projets rejetés lors du précédent appel d’offres. Ils n’ont pas hésité à majorer leur prix de 13 € le MWh (soit 13 à 15 % de plus). De même, d’autres sociétés n’ont pas rechigné à présenter à nouveau 26 mêmes projets avec des prix supérieurs de 20 € le MWh, (soit 20 à 22 % de hausse), afin bien sûr de gagner davantage. Au total, la CRE a évalué à 90 M€ le surcoût de ces 40 projets présentés une seconde fois. Ainsi, le prix retenu pour les lauréats est 27 % plus chers que pour l’appel d’offres 4-5, le dernier où il y avait davantage de demande des développeurs que d’offre mise aux enchères. La CRE a raison de dire que rien ne justifie une telle hausse alors que leur prix de revient mentionné dans leur proposition ont baissé entre temps. La CRE ne mentionne pas si elle a éliminé ces « doublons » ou si elle en a retenu une partie ou la totalité. Ces 40 doivent être rapprochés des 282 lauréats soit 14 %. Ce taux n’est pas négligeable.

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Sans mesure corrective, le photovoltaïque est en danger

Ainsi, certains développeurs, jusqu’à 14 % des candidats, ont sciemment majoré leurs prix (de 13 % à 20 %) pour augmenter leurs bénéfices de 90 M€. Ceci n’est pas acceptable pour l’avenir du photovoltaïque, car le danger est qu’on assimile ces quelques-uns, à la profession, et qu’une campagne de désinformation s’appuie sur les données officielles de la CRE pour dévaloriser le photovoltaïque.

Le danger est aussi que la population française considère qu’elle a payé et qu’elle paie trop pour le photovoltaïque au profit de quelques sociétés qui se « sucrent », s’appuyant sur les statistiques de ce Comité de Gestion des Charges du Service Public de l’Electricité. Celui-ci mentionne explicitement que les aides au photovoltaïque et à l’éolien représente 106 Mds €, soit près de 11 % de la dette publique française !

Dire que les énergies renouvelables sont l’avenir. Certes ! Mais que les ENR profitent à quelques-uns et discréditent la profession, alors, là, attention DANGER. On attend que les syndicats professionnels qui cherchent à défendre l’intérêt de la profession, fassent du ménage dans leur rang. On risque de leur adresser des critiques bien plus acerbes que celle-ci. On leur présentera une image salie du photovoltaïque. REAGISSEZ.

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Le nouveau prix record sur une enchère

Les derniers records de prix étaient passés juste en dessous de 0,03 $ par kilowattheure en 2017. Il s’agissait de centrales solaires situées dans les pays du Golfe et en Afrique du Nord. Ces records ont tenu deux ans. Ces jours-ci, le seuil de 0,02 $ / kWh a été franchi à deux reprises. Le premier, il y a deux semaines, à Los Angeles (Etats-Unis), le prix était de 0,01997 $ / kWh pour une centrale de 200 MW. Le second au Brésil : l’enchère a attribué 211 MW au prix global de 0,0175 $ / kWh, mais les petits lots de 30 MW l’ont été à 0,01688 $ / kWh. Ce prix est presque la moitié de celui de 2017 ! Ceci indique le chemin parcouru, et ce qui va advenir.

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 Ceci s’explique par l’arrêt des installations en Chine au second semestre 2018

Une première étape de baisse est intervenue au second semestre 2018. La raison en est la décision des autorités chinoises de geler les subventions à la construction de centrales. Le quasi-arrêt des installations en Chine au second semestre 2018 a provoqué une surproduction chez les fabricants. En conséquence, une baisse des prix de 25 à 30 % est intervenue sur les panneaux. En 2019, il n’y a pas eu de rattrapage des prix mais la poursuite d’un effritement car les installateurs en Chine attendaient que la politique officielle soit définie et surtout précisée. Désormais, la Chine ne veut plus subventionner la construction de centrales et veut figer la dette qui existe actuellement vis à vis des constructeurs. La ligne officielle est désormais de laisser les constructeurs financer seuls les centrales, sans aucune aide ou subvention de l’Etat Central. La mesure a été plutôt bien acceptée des professionnels car la parité réseau est atteinte dans certaines régions et chez certains constructeurs. Ils savent que, s’il y a, au pire, une ou deux années difficiles, ensuite la baisse du prix des panneaux et une meilleure gestion permettront de franchir cette limite. Elle permettra de ne plus dépendre des décisions gouvernementales. Cette vision explique que les fabricants qui ne bénéficient plus du dynamisme du marché intérieur chinois, ont des capacités inemployées, réduisent actuellement leurs prix.

 

Et par la baisse naturelle des prix des panneaux et par l’augmentation des capacités

En effet, la baisse de 25 % à 30 % du second semestre 2018, ramènerait le record de 2017 (0,03 $ / kWh) à 0,0225 $ ou à 0,0210 $ / kWh. On n’est pas encore au prix américain : il faudrait encore un recul des prix de 5 % à 11 %. Le prix brésilien de 0,01688 $ / kWh est encore plus éloigné : il faudrait encore une baisse de 20 % à 40 % à horizon de deux ans. Est-ce faisable ? Est-ce réaliste ? Peut-on faire une enchère à ce prix ? D’une part, on peut se référer à la baisse moyenne annuelle de 15 % à 20 % des prix. Ceci devrait permettre d’atteindre cet objectif. D’autre part, une autre raison milite pour la crédibilité de ce schéma, c’est la volonté de croissance (d’aucuns diraient, de la folie des grandeurs) de certains fabricants chinois. Ceux-ci sont convaincus que le photovoltaïque doit s’imposer dans le monde. Il suffit d’offrir le produit le moins cher. Alors, on trouvera toujours des clients. Pour être le mieux disant, il faut pouvoir acheter de très grosses quantités, faire donc jouer les économies d’échelle, afin de vendre en dessous du prix des concurrents moins importants ou moins bien organisés. Cette logique guide la profession depuis une dizaine d’années. Il suffit de continuer. Les programmes de développement de LONGi, Zhonghuan, Tongwei reposent sur une capacité de production qui atteigne les 25 % à 40 % du marché mondial. Ainsi, LONGi annonce vouloir doubler sa capacité actuelle de production de panneaux en la portant à 30 GW d’ici 2020 pour un volume mondial du marché de 100 GW en 2018 et autour de 115 GW en 2019. De même pour les deux autres sociétés citées. Avec ce poids, les grands fabricants pourront imposer leurs prix et leurs produits. Surtout, ils estiment qu’ils pourront surclasser les concurrents qui n’auront pas procédé aux mêmes investissements de capacité et qui seront donc relégués au rang de second acteur.

La montée en cadence de ces nouvelles capacités de production provoquera, régulièrement et à chaque fois, un choc sur les prix, car la production de ces nouvelles usines devra se faire une place sur le marché. Ceci poussera les prix à la baisse jusqu’à ce que l’un ou l’autre cède. Il faut donc s’attendre à une guerre des prix féroce si la demande sur le marché est faible ou stagnante, et à une pression sur les prix si la demande mondiale augmente à un rythme soutenu (sur longue durée, elle est de l’ordre de 30 % par an).

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Le nouveau record n’a pas été critiqué comme inatteignable !

Les constructeurs de centrales au Brésil ont misé sur tous ces paramètres pour estimer le prix probable à horizon de deux ans. Il est curieux de remarquer qu’autant les prix issus de l’enchère en 2017 (0,03 $ / kWh) étaient critiqués comme non-atteignables par les observateurs, autant le prix de 0,02 $ n’a donné lieu à aucune critique, ni aucune contestation, comme si les commentateurs de 2017 hésitaient à remettre en cause un prix qui semble raisonnable ; comme si les enchérisseurs n’avaient pris aucun risque en proposant ce prix ; comme s’ils auraient pu être plus ambitieux ! Si c’est le cas, on le verra bien vite par de nouveaux records.

Reste, pourquoi le Brésil ? Ce n’est pas le plus ensoleillé de la planète. Ce n’est pas celui qui a le plus de désert. C’est la première fois qu’il obtient un tel record ! Est-ce parce que c’est le pays qui a organisé une des premières enchères de l’année ? Ou simplement, est-ce parce qu’il y a des conditions d’installations ou de financement particulièrement favorables qui ont permis aux développeurs de frapper un grand coup, avec l’établissement d’un record de prix qu’il sera difficile à battre dans le proche avenir ? On saura vite si d’autres pays consentent des conditions aussi favorables et incitent les développeurs à battre ce record. Il sera battu un jour ou l’autre, dans les prochaines semaines ou les prochains mois.

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