L R AS Published on Monday 27 February 2017 - n° 181 - Categories:Regard sur le PV

Regard sur le PV n° 181

 SUNPOWER VIENT DE FAIRE CONNAITRE SA STRATEGIE

Il lance un produit innovant dans les panneaux

Témoignage de confiance, la capacité de production de ce produit sera portée à 5 GW fin 2018

LES DEVELOPPEURS CHINOIS SONT RETICENTS A LANCER DES PROJETS

Des retards de paiement

LES NUAGES S’AMONCELLENT SUR LES BATTERIES AU LITHIUM

Il en résultera des surcoûts

On a développé des batteries stationnaires au lithium avec des défauts rédhibitoires

Les fabricants de batteries à flux croient avoir la solution

On a déjà préparé l’étape suivante à la batterie

SUNPOWER VIENT DE FAIRE CONNAITRE SA STRATEGIE

   Jusqu’à présent, la société annonçait des fermetures d’usines, des licenciements, et des pertes du fait de l’incapacité à suivre la baisse du prix des panneaux. On se demandait pourquoi la société subissait et pourquoi elle ne réagissait pas !

   SunPower est depuis son origine, spécialisée sur des panneaux ayant un fort taux de conversion. En contrepartie, ils sont bien plus chers que les panneaux standards. Ces produits sont réservés à des utilisations spécifiques (faibles surfaces de toit exigeant un taux de conversion élevé). Tant que les prix des produits standard ne s’étaient pas effondrés comme ils l’ont fait au second semestre (avec selon les sources, une baisse de 35 % des prix au cours de la seule année 2016 selon JA Solar, de 50 % selon le syndicat chinois des industries PV), la société pouvait encore vendre mais après la baisse du second semestre 2016, l’écart de prix devenait trop élevé, l’obligeant à licencier ou à supprimer des lignes de production, et même à s’interroger sur l’opportunité de sortir du segment des grandes centrales où le prix de ses panneaux les rendait trop cher par rapport à ceux des concurrents.

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Il lance un produit innovant dans les panneaux

   SunPower vient de sortir le produit qui doit lui permettre de rester sur le créneau des produits standard. Il avait racheté en 2015 la technologie de Cogenra. Celle-ci positionne les cellules non pas sur le plan du panneau, ce qui crée un espace entre les cellules, fait perdre de la place et donc une partie du taux de conversion au panneau. Elle superpose les cellules (en réalité des demie-cellules) à leur extrémité, les relie par une pâte de métallisation pour assurer leur jonction énergétique, avec probablement en dessous de cet assemblage les barres d’évacuation de l’énergie produite. L’avantage de cette position des cellules est la réduction des espaces et donc un gain de puissance.

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Témoignage de confiance, la capacité de production de ce produit sera portée à 5 GW fin 2018

   Pour que SunPower n’ait pas présenté plus tôt son nouveau produit (panneau de la série P), c’est qu’il ne doit pas être très difficile de le réaliser et que la société ne voulait pas alerter ses concurrents du lancement de ce produit. En effet, depuis un an, une production en test est réalisée par deux sous traitants chinois. SunPower a dû acheter cette production pour l’installer sur de grandes centrales afin de tester la tenue de ces panneaux, la résistance aux intempéries ou encore la faisabilité technique. Aujourd’hui, c’est prêt. La société annonce officiellement son partenariat avec les deux sociétés chinoises. Avec un programme clair, lancer de façon massive ce nouveau produit comme alternative aux panneaux habituels. Alors que l’un des partenaires n’a qu’une capacité de production de 500 MW par an et qu’il en utilise certainement une grande partie pour la fabrication de panneaux traditionnels, et une petite partie pour les panneaux pour la série P, il va mettre en service une capacité de production de 1 GW en 2017, et 5 GW d’ici la fin de 2018. Cet objectif qui fera rentrer son fabricant parmi les dix premiers fabricants mondiaux et même parmi les cinq plus importants, indique la très grande supériorité de cette nouvelle technologie sur l’ancienne, sur le gain de puissance obtenu pour un prix de production à peine supérieur. SunPower estime avec ce produit qu’il va redevenir un des principaux fabricants mondiaux : il occuperait la production de gamme moyenne, celle de ses concurrents, en apportant un gain supplémentaire de production. Il conserverait aussi une place sur les panneaux à haut rendement (25 % de taux de conversion). De quoi couvrir l’ensemble de la gamme des panneaux. Il est symptomatique que SunPower n’ait pas cité de puissance de sortie de son panneau pour ne pas alerter ses concurrents ou les inciter à se lancer sur ce type de production. Seul le chinois Seraphin dispose d’une technologie comparable. Lerri filiale de LONGi développe aussi un tel projet.

   Si cette analyse est exacte, un bouleversement dans la hiérarchie des producteurs de panneaux va intervenir de là où on ne l’attendait pas. Au moyen d’une technologie différente soutenue par un producteur déjà bien installé sur le marché. Il a les moyens de passer les accords de production; il a la puissance commerciale qu’il faut pour propulser le produit en tête des ventes…

   Etant parvenu au stade de lancement de ce nouveau produit, le PDG de SunPower ajoute brièvement «  désormais, nous devons innover dans le panneau ». Il lui faut découvrir ce qui sera porteur à horizon de quelques années.

   Désormais, on peut donc être confiant dans l’avenir de SunPower.

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LES DEVELOPPEURS CHINOIS SONT RETICENTS A LANCER DES PROJETS

   La faiblesse de la demande de panneaux en ce milieu de février alerte sur les difficultés rencontrées par les développeurs chinois. Ils ne semblent pas avoir autant lancé de projets comme l’an dernier à la même date. Manifestement, ils retardent leurs achats. Conséquence, les prix des panneaux ont tendance à reculer. Même s’il y aura une ruée au cours du second trimestre pour parvenir à achever les projets avant le 30 juin, le manque d’engouement des développeurs chinois est manifeste.

   Ceci est à rapprocher des informations données par ailleurs : 11,2 % du total de la production photovoltaïque chinoise a été perdue en 2016, soit 7,4 TWh du fait des difficultés pour évacuer la production énergétique du fait de l’insuffisance du réseau électrique local. Il faudrait savoir si les autorités ont payé la production non injectée dans le réseau ou si cela a été à la charge des exploitants de centrales !

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Des retards de paiement

   Il s’y ajoute les retards de paiement des subventions aux développeurs ou aux exploitants qui ont augmenté de moitié entre 2015 et 2016 pour atteindre 6,4 milliards de dollars à fin décembre 2016. Si le prix du mégawatt installé coûte 1 M$ à 1,5 M$ en Chine pour les 34,5 GW installés en 2016, ce retard de paiement représente entre 13 % et 20 % du coût de la construction. Ce n’est pas uniquement sur la fin de l’année que ce retard a été constaté mais tout au long de l’année, ce qui a certainement douché un certain nombre d’initiatives de développeurs chinois. Ceux-ci ont dû faire leur compte : travailler, engager des capitaux empruntés pour après avoir des décalages de trésorerie provenant du gouvernement, cela n’en vaut pas la peine. Il ne faut pas s’étonner que l’organisation patronale évalue à 20 GW les installations en 2017 (contre 34,5 GW sur l’année 2016).

   Si ceci est le cas, on ne doit pas s’étonner de la faiblesse de la demande de panneaux : il y a une diminution de près de 15 GW alors que c’est encore la mauvaise saison pour les installations en Europe et aux Etats-Unis…

   En revanche, si ceci persiste, on peut s’interroger sur les difficultés à venir de la filière de production qui augmente constamment ses capacités (une nouvelle unité de 2,1 GW de production de cellules monosilicium de type N sera mise en service en septembre), qui modernise ses installations pour suivre une demande vers un taux plus élevé des cellules, et qui se retrouve avec des invendus qui doivent être bradés pour faire diminuer les stocks…

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LES NUAGES S’AMONCELLENT SUR LES BATTERIES AU LITHIUM

   Après les incendies et explosions des batteries des portables Samsung Galaxy, après le récent incendie dans une usine de fabrication de batteries en Chine il y a un mois, les autorités commencent à se méfier de ces batteries. Déjà l’Allemagne impose de ne pas placer de telles batteries dans les chambres. L’état du Queenland en Australie va bien plus loin en imposant l’exclusion des batteries des habitations. Elles doivent être placées à l’extérieur des logements et des garages. Dans l’attente de précision, cette mesure parait concerner toutes les sortes de batteries : le lithium-ion, le plomb-acide, les batteries à flux à base de nickel, la technologie hybride-ion. Les autorités craignent des incendies et l’émission de produits chimiques toxiques.

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Il en résultera des surcoûts

   Même si cette mesure est encore isolée, elle entrave le développement du stockage résidentiel et même commercial ou industriel en Australie car il y aura un surcoût d’installation, ce dont les batteries n’avaient pas besoin, car le stockage pour l’autoconsommation est déjà très cher ce qui freine sa diffusion.

   Tous les fabricants de batteries dans le monde ont extrapolé les batteries cylindriques et les boutons, aux batteries stationnaires ou pour véhicules électriques, passant d’une petite taille où il faut de la puissance sous une faible taille, à une grande taille qui crée des dangers spécifiques. Ils ont lancé des investissements considérables pour fabriquer un très gros volume de batteries, espérant ainsi abaisser les prix de revient et donc le coût du kilowattheure stocké. Ils veulent pouvoir profiter d’un marché qui, selon certaines études, devrait septupler en dix ans pour satisfaire les systèmes de stockage lié à l’autoconsommation et les batteries de véhicules électriques.

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On a développé des batteries stationnaires au lithium avec des défauts rédhibitoires

  Depuis longtemps, les batteries au lithium ayant une certaine taille font l’objet de la conviction qu’elles ne sont pas faites pour le stockage ou les véhicules. Les critiques sont nombreuses et convergentes (elles proviennent de concepteurs d’autres technologies de batteries qui n’utilisent pas le lithium, car les promoteurs de la technologie du lithium la préconisent et oublient d’indiquer ou minimisent ses inconvénients) :

- Une batterie au lithium ne peut que fournir 80 % (au maximum) de sa charge; sans cela la batterie se dégrade rapidement;

- Sa durée de vie est de neuf à dix ans, mais les cellules se dégradent rapidement et doivent être changées fréquemment;

- Une batterie au lithium n’est pas faite pour une charge-décharge rapide, couplée avec une puissance élevée. En fait, il faudrait deux batteries distinctes ayant une chimie différente;

- La valeur du lithium dans une telle batterie ne représente que 35 % du coût de fabrication car le reste est constitué d’un module de refroidissement pour éviter un emballement thermique. Ceci augmente la complexité de la batterie et les problèmes de fiabilité, et réduit aussi la capacité de la batterie.

- La plupart des batteries au lithium sont capables que d’effectuer un cycle par jour et ont besoin d’une période de repos. Ceci ne correspond pas à l’utilisation de batteries stationnaires qui peuvent être sollicitées pour plusieurs cycles par jour de charges, puis de décharges.

- Le lithium est peu abondant sur terre. Il est évalué à 0,0002 % de la croûte terrestre et n’est que le 33ème matériau le plus abondant sur terre. Ses gisements sont à 70 % répartis sur trois pays d’Amérique du Sud. Le lithium doit être associé à d’autres métaux rares et chers (cobalt,…). La demande de ce matériau est si forte que le prix du kilogramme a été multiplié par trois en dix-huit mois (de 7 $/kg mi-2015, à 20 $/kg actuellement). Cette tendance à la hausse des cours du matériau ne peut que s’accélérer avec l’augmentation de la demande. Même si le lithium ne représente que 35 % du prix d’une batterie, l’augmentation du coût du minerai de base ne peut qu’empêcher une baisse du prix de la batterie et donc du kilowattheure qu’elle peut fournir. Or, on compte sur une baisse du coût du kilowattheure pour assurer la diffusion de l’autoconsommation, et le développement des véhicules électriques. L’augmentation de la demande exercerait une pression sur les coûts rendant difficile la généralisation de l’utilisation du lithium.

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Les fabricants de batteries à flux croient avoir la solution

   Face à ce constat, les fabricants de batteries à flux, notamment en zinc-fer, estiment qu’ils fournissent une solution à tous les handicaps présentés par la batterie au lithium. Mais contrairement à son concurrent, cette technologie doit encore prouver sa valeur et son intérêt. Elles ne sont pas encore reconnues comme une bonne alternative. Mais de nombreux fabricants (ViZn Energy,  Redflow, Primus Power,… pour ne mentionner que les sociétés rencontrées cette semaine,…) se sont positionnés sur ce type de batteries, avec une plus longue durée de restitution de l’énergie qui atteint quatre à cinq heures, ce qui permet de franchir le pic de la demande au milieu de la journée.

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On a déjà préparé l’étape suivante à la batterie

   La batterie est le dernier obstacle au développement de l’autoconsommation car sinon les industriels ont déjà trouvé des solutions aux autres problèmes que ce soit les logiciels de gestion des batteries, ou la gestion des différents appareils ménagers en fonction de la production d’électricité par les panneaux. Les japonais (Panasonic, Sharp, Mitsubishi,…) se sont spécialisés dans cette branche d’activité. Un des derniers est Kyocera qui utilise l’intelligence artificielle pour gérer l’énergie dans les habitations que ce soit l’absorption de la production soit par la batterie soit par le réseau, soit encore par les appareils ménagers, ou encore selon les différentes pièces à vivre. Le but est d’utiliser au mieux la production et d’en combiner l’utilisation pour être en autoconsommation le plus longtemps possible.

   Le système est déjà très abordable car l’appareil lui-même est mis en vente à 750 € (probablement chez le fournisseur et non installé chez le client) et l’écran de contrôle à 380 €. Il ne reste plus qu’à disposer d’une batterie suffisamment bon marché pour rendre possible cette gestion interne d’un bâtiment ! C’est le problème évoqué ci-dessus…

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